», est-il écrit en épigraphe du poème « Le Cri de guerre du mufti » (cf. Le plus prestigieux des lieux de représentation officiels, le Théâtre-Français, comptait 1 552 places (qui valaient entre 1,80 et 6,60 francs[46]) et avait pour vocation de promouvoir et de défendre le grand répertoire dramatique : Racine, Corneille, Molière, Marivaux parfois, Voltaire et ses continuateurs néo-classiques : il était explicitement subventionné pour cette mission. En réalité, c'est le 2 mars que Hugo, après quelques hésitations quant au choix de l'éditeur, permit à Mame d'éditer Hernani (dont le texte était sensiblement différent de celui que nous connaissons aujourd'hui[102]). Le public se partageait donc entre les partisans de Victor Hugo, ses adversaires, et les curieux venus assister à cette première qui partout était annoncée comme étant la dernière d'une pièce dont on avait tant parlé. Toutes les manifestations de la querelle d'Hernani ne furent pas aussi plaisantes que ces parodies : un jeune homme fut tué dans un duel, en défendant les couleurs de la pièce de Victor Hugo[114]. PRÉSENTATION: 1 ère grande tirade de DJ Il ne s'agirait plus de décrire la fin du règne de Louis XIII, mais l'avènement de Charles Quint comme empereur : davantage encore que Cromwell, Don Carlos évoquerait Napoléon[63]. En mai 1829, la tragédie « semi-romantique » en vers de Casimir Delavigne, Marino Faliero (inspirée de Byron), obtint un succès triomphal, alors que sur plusieurs aspects elle n'était pas moins novatrice qu’Hernani[39]. La censure royale avait refusé les deux premiers titres proposés : À l'exception d'une seule, donnée devant un parterre de lycéens (cf. a) L'unité de temps n'est pas respectée : ans Ruy Blas l'action dure un peu plus de six mois. La dimension générationnelle se superposait d'ailleurs à cette dimension politique : de jeunes révolutionnaires s'opposaient à un gouvernement gérontocratique composé d'anciens émigrés revenus d'exil « sans avoir rien appris ni rien oublié » comme le disait un mot de l'époque[86], qui voulait la perte d'une pièce dans laquelle c'était justement un vieillard qui condamnait à mort de jeunes époux[87]. Hugo n'avait pas seulement comme ennemi les défenseurs du gouvernement réactionnaire de Polignac : à l'autre bout de l'échiquier politique, les libéraux se méfiaient de l'ancien « ultra », qui avait commencé à se rapprocher d'eux à la fin de l'année 1829[77], tout en ne cachant pas sa fascination pour Napoléon[78]. À mesure que les jours passaient, le climat devenait de plus en plus hostile. Mais c'était sans compter sur la commission de censure, présidée par Charles Brifaut, qui décida d'interdire les représentations de la pièce. Chénier était conscient lui-même de la portée idéologique du conflit et de la place stratégique du théâtre, lui qui écrivait dans « l'épitre dédicatoire » de sa pièce que, « si les mœurs d'une nation forment d'abord l'esprit de ses ouvrages dramatiques, bientôt ses ouvrages dramatiques forment son esprit »[32]. Au même moment, Hernani interrompt la scène en proposant d'affronter le roi en duel. Ils ne pouvaient en revanche, en ce qui concernait l'interprétation du drame nouveau, rivaliser avec les grands acteurs du théâtre de la Porte-Saint-Martin, un Frédérick Lemaître ou une Marie Dorval. Certes, Shakespeare était encore glorifié, comme étant la synthèse de ces trois grands génies que furent Corneille, Molière et Beaumarchais[15], les unités de temps et de lieu étaient perçues comme accessoires (l'utilité de l'unité d'action était en revanche réaffirmée[16]), Hugo retrouvant l'argument de Lessing qui trouvait absurdes les vestibules, péristyles et antichambres dans lesquels, paradoxalement au nom de la vraisemblance, se déroulait l'action de la tragédie[17]. S reproche alors lâinconstance et lâinfidélité de son maître, qui rompt les liens sacrés du mariage. Leur insuffisance était manifeste lorsqu’il s’agissait de jouer le théâtre de Hugo chez qui, explique Dumas, « le comique et le tragique se touchent sans nuances intermédiaires, ce qui rend l’interprétation de sa pensée plus difficile que s’il [...] se donnait la peine d’établir une gamme ascendante ou descendante. Ce manifeste du drame romantique fut diversement reçu, suivant l'âge de ses lecteurs : « il irritait ses aînés, ses contemporains l'aimaient, ses cadets l'adoraient », explique le biographe de Hugo Jean-Marc Hovasse[27]. La métaphore militaire et le parallèle avec Bonaparte se poursuivaient dans la suite du récit, qui faisait également la part belle au pittoresque (un chapitre entier du livre est consacré au « gilet rouge »), et qui surtout condensait en une seule soirée mémorable des évènements empruntés à des représentations différentes, dans une évocation largement idéalisée des évènements qui contribuerait durablement à fixer à la date du 25 février 1830 l'acte fondateur du romantisme en France[132]. Il cria à ces hommes assez âgés pour se souvenir de la Terreur : « À la guillotine, les genoux ! Celle-ci y établissait l'existence de deux systèmes théâtraux en Europe : le système français, sur lequel régnait la tragédie classique, et le système allemand (dans lequel elle incluait Shakespeare), dominé par la tragédie historique[7]. « Hierro, despierta te ! En conséquence de quoi les scènes se multiplièrent à Paris entre la Révolution et la Restauration (malgré un coup d'arrêt sous l'Empire). Théophile Gautier, Histoire du romantisme, Cœuvres-et-Valsery, Ressouvenances, 2007, extraits consacrés à l'évocation de la bataille d'Hernani, « Hugo et l'alexandrin de théâtre aux années 30 : une question secondaire », Victor Hugo raconté par un témoin de sa vie, Le cadre administratif des théâtres autour de 1830, « La question du grand homme dans l'œuvre de Victor Hugo », consultable sur le site du C.R.D.P. Mais la principale source qui contribua à fixer les images de la légende de la bataille d'Hernani, c'est chez Théophile Gautier qu'il faut l'aller chercher, plus précisément dans cette Histoire du romantisme dont l'écriture occupa les derniers mois de sa vie, en 1872. Les soldats pour la plupart n'avaient pas atteint leur majorité, et le plus vieux de la bande était le général en chef, âgé de vingt-huit ans. Acte I, scène 1, Classiques Bordas, p.43. Ce qui donnait : « Oui, de ta suite, ô roi ! Ce groupe de plusieurs centaines de personnes fut plus tard nommé par Théophile Gautier « l'armée romantique », dans une référence explicite à l'épopée napoléonienne : « Dans l'armée romantique comme dans l'armée d'Italie tout le monde était jeune. La forme sous laquelle elle est généralement connue aujourd'hui est toutefois tributaire des récits qui en ont été donnés par les témoins de l'époque (Théophile Gautier principalement, qui portait à la Première le 25 février 1830 un gilet rouge qui par son caractère provocateur resterait dans l'histoire), mêlant vérité et légendes dans une reconstruction épique destinée à en faire l'acte fondateur du romantisme en France. Cité par Anne Ubersfeld, Le Drame romantique, Les deux vers ont le même nombre de syllabes en raison de la, Le parallèle est établi par Anne Ubersfeld, in. Hostiles et décontenancés, « la plupart se moquent de ce qu'ils ont à dire », se plaignait Victor Hugo dans son journal à la date du 7 mars[108]. Cette métaphore animalière, si elle n'était pas inédite dans le théâtre classique (on la retrouve dans Esther de Racine et dans L'Orphelin de la Chine de Voltaire[72]), avait en effet pris dans le premier tiers du XIXe siècle une connotation juvénile dont la comédienne estimait qu'elle convenait bien peu à son partenaire de jeu[73]. Le système français, expliquait-elle, par le choix des sujets tirés d'une histoire et d'une mythologie étrangères, ne pouvait remplir le rôle qui était celui de la tragédie historique « allemande », qui renforçait l'unité nationale par la représentation de sujets tirés, justement, de l'histoire nationale. Du pathétique au tragique. En 1872, Théophile Gautier se souviendrait que, pour ceux de sa génération, la préface de Cromwell « rayonnait à [leurs] yeux comme les tables de la Loi sur le Sinaï, et [que] ses arguments [leur] semblaient sans réplique »[29]. Le vers lui semblait au contraire la langue idéale pour un drame envisagé non pas tant comme un miroir de la nature que comme un « miroir de concentration » qui amplifie l'effet des objets qu'il reflète, faisant « d'une lueur une lumière, d'une lumière une flamme »[24]. Si les adversaires d'Hernani connaissaient le « lion superbe et généreux », c'est parce qu'il y avait eu des fuites dans la presse, qui en avait publié une partie : c'était Brifaut lui-même qui, ayant conservé une copie du texte soumis à la commission de censure, l'avait divulgué. L'idée de Hugo de faire « un art élitaire pour tous », un théâtre en vers destiné à la fois à l'élite et au peuple, lui semblait dangereuse[110]. Yves Gohin, in Victor Hugo, Hernani, Paris, Gallimard, coll. Le public, majoritairement composé de jeunes gens qui ne connaissaient les chahuts de 1830 que par ouï-dire, applaudit bruyamment aux répliques qui avaient été sifflées (ou étaient supposées l'avoir été) en 1830, et manifesta sa réprobation lorsqu'il n'entendait pas les vers attendus[132] (le texte joué reprenait pour l'essentiel celui de 1830, avec les modifications opérées par Hugo après les premières représentations[134]). Jean-Marie Thomasseau, « Le vers noble ou les chiens noirs de la prose ». Validez la personnalisation effectuée par nos experts. Cinq jours plus tard, le Théâtre-Français acceptait la pièce à l'unanimité[65]. Scène 2. Nombreux étaient alors ceux qui pensaient que la pièce ne passerait pas la première, et l'on s'arrachait les places de cette unique représentation[82]. Un spectateur trouva la mort, trois cents étudiants furent arrêtés et incorporés de force dans l'armée[36]. Ce qui dans le fond gênait Carrel, c'était le brouillage des genres opéré par l'esthétique hugolienne : lui-même considérait avec les « classiques » qu'il y avait un grand genre théâtral destiné à l'élite, la tragédie, et, pour éduquer le peuple, un genre mineur et esthétiquement moins exigeant, le mélodrame. Mais bientôt le rideau se leva. Un critique du journal légitimiste La Quotidienne le rappellerait sans détour en 1838 à l'occasion d'un autre scandale, provoqué cette fois par Ruy Blas : « Que M. Hugo ne s'y trompe pas, ses pièces trouvent plus d'opposition à son système politique qu'à son système dramatique ; on leur en veut moins de mépriser Aristote que d'insulter les rois […] et on lui pardonnera toujours plus aisément d'imiter Shakespeare que Cromwell »[126]. Parmi ces derniers, le principal lieu de diffusion de l'esthétique romantique était le théâtre de la Porte-Saint-Martin, où seraient joués la plupart des drames de Dumas ainsi que plusieurs pièces de Hugo, au milieu de vaudevilles et de mélodrames[45]. » (cf. Les manifestations de la sensibilité ne sont bien sûr pas l'apanage d'une époque en particulier. Et, pour que le public vît bien « jusqu'à quel point d'égarement » s'était aventuré Hugo, on lui montra des vers tronqués. Notons toutefois l’avis de Sainte-Beuve : « La question romantique est portée, par le seul fait d’Hernani, de cent lieues en avant, et toutes les théories des contradicteurs sont bouleversées ; il faut qu’ils en rebâtissent d’autres à nouveaux frais, que la prochaine pièce de Hugo détruira encore »[120]. Par ailleurs, les adversaires esthétiques de Hugo, les dramaturges néo-classiques, étaient eux aussi libéraux[80] et ils se livraient à un travail de sape auprès des comédiens, qu'ils entreprenaient de démotiver[81]. Pour ces derniers, la pièce et sa préface faisaient presque figure de Bible[28]. Mais si le sujet de ces pièces était suffisamment audacieux pour provoquer des conflits parfois violents, leur forme restait académique ; avec Christophe Colomb, représenté en 1809 au théâtre de l'Odéon (alors appelé théâtre de l'Impératrice), le dramaturge Népomucène Lemercier entreprit en revanche de s'affranchir des unités de temps et de lieu, de mêler les registres (comique et pathétique), enfin de se permettre des libertés avec les règles de la versification classique : à la première de la pièce, les spectateurs, médusés, ne réagirent pas. Critiques. Conscients de la situation, les principaux fournisseurs du Théâtre-Français en pièces nouvelles, les auteurs de tragédies néo-classiques adressèrent-ils en janvier 1829 une pétition à Charles X afin qu'il interdît la représentation en ce lieu du drame romantique. Anne Ubersfeld, in J. de Jomaron. Les trente dernières années du xviii e siècle sont cependant marquées par quelques phénomènes majeurs qui se situent à l'aube du romantisme. Nous voilà en présence d'Oreste, de Pyrrhus et de Phoenix. En 1827, acte I, théorique : Cromwell et sa Préface proclament la liberté dans l'art, la mort des « règles » classiques, la beauté moderne du « grotesque ». »[75]. Du côté du Théâtre-Français, après l'interruption causée par la Révolution de Juillet, les comédiens se montrèrent peu pressés de reprendre les représentations d'Hernani. Par ailleurs, Stendhal s'insurgeait contre le fait que l'esthétique au théâtre demeurât au XIXe siècle ce qu'elle avait été aux deux siècles précédents : « De mémoire d'historien, jamais peuple n'a éprouvé, dans ses mœurs et dans ses plaisirs, de changement plus rapide et plus total que celui de 1770 à 1823 ; et l'on veut nous donner toujours la même littérature ! Le 10 mars, le public en vint aux mains, et la police dut intervenir[107]. Hernani : Acte I Scène 1: Hernani : Acte I Scène 4: Hernani : Acte III Scène 4 : tirade de Hernani: L'Expiation : "Il Neigeait" La Coccinelle: La Fonction du poète: Le mendiant: Le soleil s'est couché... Les Châtiments : Sonnez, sonnez toujours, clairons de la pensée: Les Misérables : Chapitre 1 : ⦠La pièce fut finalement représentée en novembre 1789, avec le tragédien François-Joseph Talma dans le rôle principal. Après la Révolution française, c'est encore du côté de l'Allemagne que vint la critique, avec l'ouvrage, justement intitulé De l'Allemagne (1810), de Madame de Staël. C'était l'âge de Bonaparte et de Victor Hugo à cette date »[88]. Victor Hugo n'en avait pourtant pas fini avec la censure, officiellement supprimée par le gouvernement de Louis-Philippe : deux ans après Hernani, Le Roi s'amuse, après une unique représentation tout aussi houleuse que celles d'Hernani[123], fut interdite par le gouvernement, au motif que les « mœurs [étaient] outragées »[124]. Quant à Beaumarchais, il expliqua dans son Essai sur le genre dramatique sérieux (1767) que le drame bourgeois offrait au public contemporain une moralité à la fois plus directe et plus profonde que l'ancienne tragédie[4]. Or, la claque était composée de proches des dramaturges classiques, leurs clients habituels, et était donc peu susceptible de soutenir avec tout l'enthousiasme souhaité la pièce de leur ennemi[83]. Edition de pièces de théâtre Et il se remit au travail en vue d'écrire une nouvelle pièce. Anne Ubersfeld, « Le moi et l'histoire », in Jacqueline de jomaron (dir.). En attente de votre réponse, Bonne journée Léana Les deux représentations qui suivirent eurent autant de succès : il faut dire que le baron Taylor avait prié Hugo de faire revenir sa « claque » (qui n'aurait plus à passer l'après-midi dans le théâtre), et que pas moins de six cents étudiants formaient la troupe des partisans de l'écrivain[99]. On espérait à la préfecture que des échauffourées éclateraient, obligeant à disperser cette foule de jeunes gens anticonformistes[96]. Ce jour-là, ce furent les premiers qui triomphèrent. dans la scène 2 de lâacte I, Bridaine accuse Blazius de sentir le vin » ; dans la scène 5 de lâacte I, Blazius confie au baron que Bridaine est un ivrogne ; Blazius révèle au baron que son fils se promène avec une jeune paysanne (I,5), tandis que Bridaine lui apprend que Perdican a offert sa chaîne à Rosette (III,5). L'incipit de cette histoire y est rédigé comme suit : « De ceux qui, répondant au cor d’Hernani, s’engagèrent à sa suite dans l’âpre montagne du Romantisme et en défendirent si vaillamment les défilés contre les attaques des classiques, il ne survit qu’un petit nombre de vétérans disparaissant chaque jour comme les médaillés de Sainte-Hélène. Cité par Anne Ubersfeld, in J. de Jomaron. La subvention fonctionnait alors comme un auxiliaire de la censure : « la subvention, c'est la sujétion », écrirait Victor Hugo en 1872[47]. En revanche, dès la seconde représentation, le public, majoritairement composé d'étudiants hostiles aux libertés prises par l'auteur avec les canons classiques, provoqua des heurts suffisamment violents pour que des grenadiers investissent la salle, baïonnette au fusil. 1 Celles dont il est question plus haut dans le texte, câest-à-dire « le plaisir sérieux » et « le plaisir folâtre ». Situation : 1 ère scène dâexposition de Dj de M, qui présente les actions antérieures à la pièce, notamment la mariage dâElvire et DJ. La bataille d'Hernani est le nom donné à la polémique et aux chahuts qui entourèrent en 1830 les représentations de la pièce Hernani, drame romantique de Victor Hugo. Anne Ubersfeld. La lutte contre les dogmes esthétiques du classicisme, avec ses règles strictes et sa hiérarchisation rigide des genres théâtraux, débuta dès le XVIIe siècle, lorsque Corneille s'en prenait dans ses préfaces aux contraignantes codifications établies par les doctes se réclamant d'Aristote, ou encore avec la « grande comédie » qu'avait inventée Molière avec ses pièces en cinq actes et en vers (c'est-à-dire dans la forme usuelle de la tragédie) qui à la dimension comique ajoutait la critique de mœurs (Tartuffe, Le Misanthrope, L'École des femmes[1]…). Nous allons combattre cette vieille littérature crénelée, verrouillée […] Ce siège est la lutte de l'ancien monde et du nouveau monde, nous sommes tous du monde nouveau »[94]. Les théâtres du boulevard, de leur côté, amusaient Paris avec leurs parodies d'Hernani : N, i, Ni ou le Danger des Castilles (amphigouri romantique en cinq actes et vers sublimes mêlés de prose ridicule), Harnali ou la Contrainte par Cor, ou encore, tout simplement, Hernani[111]. Ainsi Cromwell était-il à la fois un Tibère et un Dandin[22]. ● Appelez-nous pour plus d'informations au. Et non pas en 1828, ainsi qu'il est indiqué sur l'édition princeps (cf. Le recrutement de la claque romantique s'effectua dans les ateliers de peinture et de sculpture, auprès de leurs étudiants, auxquels s'associèrent de jeunes littérateurs et musiciens. L'auteur de la préface de Cromwell ne pouvait se permettre de passer au second plan et de laisser le devant de la scène à des dramaturges qui, bien qu'ils fussent ses amis, n'en étaient pas moins des rivaux qui menaçaient, de l'intérieur de son camp, la position dominante de Victor Hugo[61]. — j'en suis », murmure un Hernani menaçant. Le principal organe du parti libéral, le journal Le National d'Adolphe Thiers, farouchement opposé à Charles X, serait l'un des plus virulents contempteurs de la pièce[79]. Ce qui en revanche faisait l'originalité de l'essai, c'était le caractère central qu'y occupait l'esthétique du grotesque[19] : son alliance avec le sublime en faisait le trait distinctif du « génie moderne, si complexe, si varié dans ses formes, si inépuisable dans ses créations »[20], et, puisque cette alliance n'était pas permise par la séparation stricte des genres théâtraux dans la hiérarchie classique, qui réservait le sublime à la tragédie et le grotesque à la comédie, cette hiérarchie, inapte à produire des œuvres conformes au génie de l'époque, devait laisser la place au drame, capable d'évoquer dans une même pièce le sublime d'un Ariel et le grotesque d'un Caliban[21]. ● Nous nous engageons sur les prix, les services et la réactivité. La métaphore politico-militaire de Gautier n'était ni arbitraire, ni inédite : le parallèle entre le théâtre et la Cité dans leur lutte contre les systèmes et les contraintes de l'ordre établi, réunis en 1825 dans la formule lapidaire du critique du Globe Ludovic Vitet (« le goût en France attend son 14 juillet »[89]) était l'un des topoï d'une génération de littérateurs et d'artistes qui prenait dans la révolution politique son modèle stratégique[90], et qui usait volontiers du langage militaire : « la brèche est ouverte, nous passerons »[91], avait dit Hugo après le succès du Henri III de Dumas. La scène romantique ferait un mets piquant, varié, savoureux, de ce qui sur le théâtre classique est une médecine divisée en deux pilules. Hugo, de son côté, avait réglé à sa façon le problème de la « claque », groupe de spectateurs payés pour applaudir aux endroits stratégiques des pièces, qui saluait l'entrée des artistes et qui était éventuellement chargé d'expulser les spectateurs turbulents. Il ne craignait pas de pratiquer « l'enjambement qui l'allonge », qu'il préférait à « l'inversion qui l'embrouille »[26]. Merci infiniment. En 1829, acte II, politique : Charles X fait interdire Marion de Lorme pour atteinte à la majesté royale ; Hugo rompt avec le régime. », in. Don Gomez y était renommé Dégommé, dona Sol Quasifol ou Parasol[112]… Quatre pièces parodiques et trois pamphlets (dont la tonalité ironique de l'un, dirigé contre la « cafarderie littéraire », montre qu'il fut en réalité rédigé dans l'entourage de Hugo[113]) furent ainsi lancés dans les mois qui suivirent la première représentation du drame. Scène 1 : Don Carlos sâapprête à remplacer Hernani au rendez-vous. Le décor représentait une chambre à coucher. Hugo aurait prononcé un discours dans lequel étaient à nouveau mêlées considérations esthétiques, politiques et militaires : « La bataille qui va s'engager à Hernani est celle des idées, celle du progrès. Pour tout ce passage, cf. Mais la presse libérale n'était pas en reste : son leader, Armand Carrel, écrivit pas moins de quatre articles dans Le National pour dénoncer la monstruosité du drame hugolien, et surtout pour mettre en garde le public libéral contre les amalgames répandus par l'auteur de Cromwell : non, le romantisme n'était pas l'expression du libéralisme dans l'art, et la liberté artistique n'avait rien à voir avec la liberté politique[109]. En revanche, on offrit à Hugo de tripler le montant de la pension qu'il recevait du roi. Aussi « l'emphase de l'alexandrin convient à des protestants, à des Anglais, même un peu aux Romains, mais non, certes, aux compagnons d'Henri IV et de François Ier »[10]. Si les anecdotes romanesques d'Alexandre Dumas s'intégrèrent rapidement à la légende de la bataille d'Hernani, c'est avec Adèle, son épouse, que celle-ci commença véritablement à prendre cette tonalité épique qui serait la caractéristique principale du récit de Gautier. » provoqua par exemple quelques remous au sein de la commission[63]). Doña Sol cède à l'appel de son interlocuteur, sans se douter qu'il s'agit du roi. b) L'unité de lieu ne l'est pas davantage : L'action se déroule dans deux espaces : le palais royal et la maison de don Salluste (Acte IV et V). 1. « Folio Théâtre ». L'acte suivant se déroule dans l'une des cours du palais de Don Ruy Gomez de Silva. Ce sont eux qui, avec leurs costumes excentriques, leurs chevelures hirsutes et leurs plaisanteries macabres, feraient sensation au milieu du public policé du Théâtre-Français[84]. À la fin du mois suivant, le combat déserta le théâtre pour se poursuivre dans la rue : les Trois Glorieuses commençaient, révolution dont on a pu dire par la suite que la Bataille d'Hernani avait constitué la répétition générale[116]. En 1829, Alexandre Dumas triompha avec Henri III et sa cour, drame en cinq actes et en prose, qu'il parvint à imposer à la Comédie-Française[38]. Phèdre, représenté la veille, n'avait rapporté que 450 francs[54]. Tonalité qui apparaîtrait surtout dans le texte non-expurgé de la femme du dramaturge, puisque le récit qui fut publié en 1863 sous le titre de Victor Hugo raconté par un témoin de sa vie, après relecture par le clan Hugo, en fut débarrassé, au profit d'une veine romanesque qui le situait plutôt dans la lignée de Dumas[132]. »[11]. En réalité, il est probable que la comédienne avait réussi à convaincre le dramaturge d'opérer cette modification, pour ne pas donner prise aux quolibets : c'est en effet « Monseigneur », et non « mon lion », qui était écrit sur le manuscrit du souffleur[74]. Le Théâtre-Français était depuis 1812 soumis à un régime particulier : il n'avait pas de directeur et était dirigé par une communauté de sociétaires, elle-même dirigée par un commissaire royal : en 1830, celui-ci était un homme qui, autant que faire se pouvait, soutenait la nouvelle esthétique romantique : le baron Isidore Taylor. Lorsque les autres spectateurs pénétrèrent à leur tour dans les loges, ils ne furent pas peu surpris du spectacle qu'offrait la troupe des romantiques étalée en contrebas. Pierre Frantz, « Théâtre et fêtes de la Révolution », in Jacqueline de jomaron (dir.). Hugo demanda, et obtint, un entretien avec le vicomte de Martignac, ministre de l'Intérieur de Charles X, qui était personnellement intervenu pour faire interdire la pièce[57]. Ce qui en revanche provoquait les sarcasmes et les quolibets, c'était la trivialité des dialogues, l'usage d'un vocabulaire qui n'avait pas cours dans la tragédie classique : l'absence de périphrase dans le « vous avez froid » de dona Sol à la seconde scène de l'acte I provoquait les sifflets ; un dialogue comme « Est-il minuit ? La pièce ne serait pas jouée. Pour le théoricien allemand, qui avait traduit et adapté la pièce de Diderot Le père de famille[4], la dramaturgie française, avec sa fameuse règle des trois unités, bien qu'elle prétendît s'inspirer du code antique, ne parvenait qu'à rendre artificielles et inadaptées à la réalité contemporaine des règles qui découlaient naturellement de la pratique théâtrale de leur époque, et notamment de la présence du chœur qui, figurant le peuple, « ne pouvait ni s'éloigner de ses habitations, ni s'en absenter qu'autant qu'on le peut faire d'ordinaire par simple curiosité »[6]. Anne Ubersfeld, « Le moi et l'Histoire », in J. de Romaron, Selon Jean-Marc Hovasse, l'Espagne constitue en effet pour Hugo l'espace qui lui permet de « censurer son autocensure. À l'opposé de Stendhal, Hugo préconisait pour le drame romantique le recours à la versification plutôt qu'à la prose : cette dernière était perçue comme étant l'apanage d'un théâtre historique militant et didactique qui se voulait sans doute populaire et qui rabaissait l'art à la seule dimension de l'utilitaire. Dès lors, l'histoire véritable des représentations de la pièce de Victor Hugo passa au second plan, remplacée par sa reconstitution hagiographico-épique : lorsqu'elle imprima pour son tricentenaire une plaquette commémorant ses grandes créations théâtrales, la Comédie-Française fit figurer à la date du 25 février 1830, non pas « Hernani - création », ainsi qu'elle l'avait fait pour d'autres pièces, mais « bataille d’Hernani »[135]. â j'en suis », murmure un Hernani menaçant. C'est ainsi, par exemple, que la réplique où dona Sol s'exclame : « Venir ravir de force une femme la nuit ! Ainsi, Jean-Jacques Rousseau se démarque sensiblement du mouvement des Lumières dont il est pourtant contemporain. de la scène, les 1) Lâinterprétation du texte Le metteur en scène, comme tout lecteur, a sa propre vision de la pièce (perception des personnages, de leur psychologieâ¦). I. Caractéristiques du genre théâtral 1.